Pour Mohamed Semmari, infirmier libéral à Antibes sur la Côte d’Azur « nous sommes à proximité de l’Italie et nous avons assez vite anticipé la situation en mettant en place des actions de bon sens. »
Soignant à Alger qu’il a fui dans les années 90, il est passé par l’Institut Curie à Paris où il s’est spécialisé en soins palliatifs. Puis il s’est installé à Antibes où il exerce depuis 17 ans en libéral dans son cabinet partagé avec une collègue. Depuis janvier, il est aussi trésorier de l’Union des Infirmières Libérales du Bassin Antibois (UDIL 06). Cette association cherche à faciliter la communication et l’échange sur le territoire et rassemble 110 professionnels. Elle est aussi à l’origine de la Communauté professionnelle territoriale de santé (CPTS) Antipolis à Antibes.
La force de la coordination
« Nous avons très vite monté un groupe WhatsApp avec les infirmiers, les médecins, les pharmaciens et l’hôpital d’Antibes afin d’échanger et d’avancer sur le sujet Covid-19, précise-t-il. Protéger un patient infecté, on sait le faire, mais savoir comment ne pas trop en faire ou ne pas en faire assez, c’est autre chose. La coordination de la médecine de ville a permis de mettre en place les actions au fur et à mesure de l’évolution des connaissances. Dès le départ, nous avons été soutenus par le maire qui a pu nous fournir très tôt des masquesmais aussi par des entreprises privées ou des organismes comme le Rotary Club qui ont fait de nombreux dons de sur-blouses, de visières et de gants. » Cette coordination libérale a favorisé les échanges sur la conduite à tenir, les bonnes pratiques et les tests. C’est une véritable chaîne de solidarité qui s’est mise en place sur le bassin antibois. Gérer le stress quotidien
Gérer le stress quotidien
Dans une telle période, l’appui d’un collectif joue un rôle primordial mais il ne supprime pas le stress du quotidien. Habituellement en binôme, Mohamed Semmari a complétement revu ses tournées et pris tous les patients Covid-19, en accord avec sa collègue qui a des enfants en bas âge. « J’ai eu quatre patients Covid, explique l’infirmier. Trois d’entre eux avaient une forme modérée, ils nécessitaient un suivi à domicile avec une vérification des constantes et de la saturation en oxygène. Je les voyais en fin de journée pour ne pas contaminer les autres patients. Je portais à leur domicile une sur- blouse, un masque et des lunettes.
Le 4ème patient était un cas Covid sévère et par ailleurs médecin. Il est resté chez lui assisté par un générateur d’oxygène. Je suis de nature posée mais ce cas a demandé un gros travail d’accompagnement, de soins, et d’écoute dans la durée. Il fallait aussi calmer les angoisses des proches. Je suis formé aux soins palliatifs mais là, il fallait accompagner vers la vie non vers la mort dans un climat d’inconnues et de doutes, et sans plan B ! » Si le virus était omniprésent, Mohamed Semmari se devait aussi de conserver toute son énergie pour ses patients habituels dont certains ont des pathologies lourdes (insuffisant respiratoire, transplanté du poumon). De retour à la maison, la rigueur était également de mise. « Avec ma femme qui est également infirmière dans un autre cabinet, nous avons été très stricts, confie-t-il. Pendant toute cette période, nos trois fils (âgés respectivement de 12, 15 et 18 ans) avaient interdiction de venir dans notre salle de bains et notre chambre. Nous leur parlions à distance et pas de câlins non plus avec eux ! Nous nous sommes demandé ce qui pouvait bien se passer dans leur tête mais ils ont vraiment bien joué le jeu. Peut- être parce qu’ils sont enfants de soignants... Nous, nous avons été vidés psychologiquement.
Aujourd’hui, nous restons vigilants car au-delà de notre famille, nous devons protéger nos patients. »
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